BilletLoin des yeux, loin du cœur
28 mars 2019
Du fait des effets profondément délétères que l’éloignement des centres de décision et des services a sur la vie démocratique, celui-ci doit être combattu de manière volontariste et prioritaire.
Les Chinonais le constatent maintenant chaque jour : de très nombreuses compétences ne dépendent plus de leur Mairie, mais de la Communauté de communes. Des travaux entrepris sur les quais s’éternisent-ils ? C’est la Comcom ! Une plate-bande épelant le nom de Chinon à l’entrée de la ville est-elle arrachée sans autre forme de procès ? C’est la Comcom ! Parilly va-t-il fermer ? Un nouveau rond-point ou une base nautique vont-ils voir le jour ? La Comcom ! Le Blanc Carroi va-t-il s’agrandir ? Les services techniques s’installer à la Plaine des Vaux ? Les bébés-nageurs, la bibliothèque et le conservatoire déménager ? La Comcom vous dis-je, la Comcom !
Les Chinonais constatent également que toutes ces décisions, qu’ils vivent le plus souvent – sous forme de faits accomplis – comme des régressions, ont été prises à Avoine [autant dire, pour eux, sur la planète Mars] par un bureau communautaire qui est à la démocratie locale ce que la musique militaire est à la musique.
Que dire quand un agent intercommunal vous avoue, au téléphone, qu’il ne peut pas situer l’endroit où vous résidez ? Qu’il ignore que votre rue héberge des commerces ? Qu’il ne connait pas les quartiers de votre commune ? Ou quand un responsable de syndicat mixte (le degré N+2 de l’intercommunalité) vous rétorque qu’il a 77 communes sous sa responsabilité et que la votre n’est pas le centre du monde ?
Éloignement des élus, éloignement des services : ces reculs quotidiens sont non seulement vécus comme des claques par les administrés, mais ce sont également de véritables entorses à l’esprit-même de la décentralisation : car si les regroupements de communes (ou les syndicats mixtes) ont été institués, c’est – certes – pour réaliser des économies d’échelle, mais – surtout – pour apporter, via un nouvel échelon de démocratie locale, un meilleur service aux populations concernées, c’est-à-dire un service qu’elle n’auraient pas eu, ou pas avec ce niveau de qualité, en restant isolées à l’échelon communal. L’un ne va pas sans l’autre : réaliser des économies d’échelle en dégradant le service et la proximité, c’est tout simplement tricher !
Le sentiment d’éloignement, la pratique du fait accompli et la concentration des décisions entre peu de mains entraînent un dépérissement démocratique dont la toxicité éclate au grand jour dans l’actualité nationale. Il est donc urgent de renouer avec les principes fondateurs et de ressortir les règles du jeu : les intercommunalités ne peuvent prospérer que si, dans toutes leurs décisions, elles tendent à tirer vers le haut les services proposés aux populations ET à maintenir avec elles une véritable proximité.
Ce qui impliquerait, pour ce qui concerne CC-CVL, qu’aux compétences “techniques” peu à peu récupérées par la Comcom, vienne s’ajouter une compétence majeure, la compétence “proximité“, avec son vice-président délégué, sa politique, ses équipes, ses moyens et son programme d’action.
Car cette indispensable proximité ne naît pas spontanément du fait que les membres du conseil communautaire sont issus des conseils municipaux ou du fait que le bureau communautaire soit composé de maires.
Elle doit d’abord s’affirmer au niveau intercommunal comme une priorité politique : ” nous posons la proximité comme la clé de voûte du projet communautaire ; nous engagerons tous les moyens nécessaires à son maintien et à son renforcement et nous mesurerons régulièrement nos progrès en la matière ; nous la prendrons systématiquement en compte dans nos réflexions et n’acterons aucune décision susceptible d’aller à l’encontre de cette valeur fondatrice “.
Et puisque les technocrates qui dirigent désormais nos intercommunalités se vantent de pouvoir résoudre des problèmes que les élus peinent à affronter du point de vue politique, qu’ils trouvent, parmi les solutions techniques qu’ils vénèrent, celle qui permettra au standardiste de la Comcom ou du Smictom de visualiser immédiatement, selon l’endroit d’où provient l’appel, le village, le quartier et la rue où habite leur interlocuteur, afin qu’à défaut d’une proximité réelle, celui-ci conserve au moins le sentiment de proximité et de reconnaissance auquel tout citoyen a droit comme forme minimale de respect.
Pour mémoire : les compétences de la Comcom
– Aménagement de l’espace
– Développement économique
– Tourisme
– Environnement
– Collecte et traitement des déchets
– Eau et assainissement
– Voirie
– Transport et mobilité
– Logement
– Gestion scolaire
– Construction, entretien et fonctionnement d’équipements culturels
– Construction, entretien et fonctionnement d’équipements sportifs communautaires
– Enfance jeunesse
– Action sociale et médico-sociale, politique de prévention et de développement social